
STMicroelectronics précise sa transformation malgré la brouille entre coactionnaires français et italien

Le groupe franco-italien de composants électroniques STMicroelectronics a détaillé jeudi la poursuite de son plan de transformation de l'entreprise, avec "jusqu'à 2.800" départs volontaires à l'échelle mondiale, sur fond de passe d'armes entre Paris et Rome au sujet de son PDG.
Au cœur d'une montée des tensions entre ses coactionnaires, la France et l'Italie, amorcée mercredi, le groupe a déroulé plusieurs points de son projet de "remodelage de son empreinte industrielle et de redimensionnement de sa base de coûts globale".
"Jusqu'à 2.800 personnes" pourraient ainsi être concernées par des départs à l'échelle mondiale sur une période de trois ans et "sur la base du volontariat".
Ces départs s'ajouteront à "l'attrition naturelle" des effectifs et "devraient intervenir principalement en 2026 et 2027", a précisé STMicroelectronics. Le détail des pays et des sites concernés n'a pas encore été indiqué.
En parallèle, l'entreprise aux 50.000 salariés dans le monde a indiqué qu'elle concentrerait ses investissements des prochaines années sur quelques modèles essentiels à la construction de semi-conducteurs, et mise sur l'intelligence artificielle (IA) pour augmenter la productivité de ses sites.
"En nous concentrant sur des infrastructures de fabrication de pointe et sur les technologies +mainstream+ (les plus vendues, NDLR), nous continuerons à tirer parti de tous nos sites existants, avec des missions redéfinies pour certains d'entre eux afin de soutenir leurs succès à long terme", a indiqué le PDG du groupe Jean-Marc Chéry, cité dans le communiqué.
Les contours du projet, annoncé en octobre, ont commencé à se dessiner fin janvier, quand STMicroelectronics a indiqué prévoir des économies sur ses charges d'exploitation à hauteur de 300 à 360 millions de dollars (entre 288 et 345 millions d'euros) à l'horizon 2027.
- Opposition franco-italienne -
Ces annonces surviennent en parallèle d'une vive montée des tensions entre Rome et Paris.
Les deux pays, qui détiennent conjointement 27,5% des parts du groupe, tiennent des positions diamétralement opposées sur la gouvernance de l'entreprise et son PDG.
Nommé en 2018, renouvelé pour un mandat de trois ans en 2023, Jean-Marc Chéry a vu le ministre italien des Finances Giancarlo Giorgetti lui retirer son soutien, dans des propos rapportés mercredi par Bloomberg et confirmés par le gouvernement à l'AFP.
Une prise de position en lien avec le refus du conseil de surveillance de l'entreprise de soutenir l'une des deux candidatures proposées par Rome pour intégrer cette instance interne, qualifié d'"incompréhensible, très grave et inacceptable".
Le directeur général de Bpifrance et président du conseil de surveillance de STMicroelectronics, Nicolas Dufourcq, s'est inscrit en faux : selon lui, ce rejet de la candidature de Marcello Sala n'est en rien le fait de la France, mais des membres indépendants. Le conseil de surveillance a réaffirmé son soutien à M. Chéry jeudi.
Rome, en parallèle, ne dévie pas de sa position. L'Italie compte proposer à nouveau M. Sala, proche de la Première ministre Giorgia Meloni, pour le poste resté vacant. Jeudi, un autre ministre italien, Adolfo Urso, en charge des Entreprises, s'est rangé aux côtés de son collègue de l'exécutif.
"C'est le moment de s'attaquer aux questions liées au développement industriel et donc aux investissements en Italie", a martelé M. Urso, avant que le groupe n'annonce les détails de son plan de transformation.
STMicroelectronics, qui a enregistré sur l'année 2024 une baisse de plus de 60% de son bénéfice, à 1,56 milliard de dollars (1,5 milliard d'euros), doit en parallèle faire face à une "class action", ou action de groupe, lancée à l'été 2024 aux États-Unis.
Dans sa plainte, un actionnaire reproche à Jean-Marc Chéry et au directeur financier du groupe, Lorenzo Grandi, d'avoir fourni "des déclarations extrêmement positives" avant la publication de mauvais résultats qui ont provoqué la chute du cours de Bourse.
Le conseil de surveillance a qualifié de "fausses" les accusations portées contre les membres de la direction d'avoir vendu leurs actions avant publication des résultats.
"Les ventes d'actions effectuées pendant la période d'interdiction de la société ont été réalisées par l'administrateur du plan d'actions de la société, par le biais d'une procédure automatique, afin de se conformer aux règles fiscales suisses", a indiqué l'organe.
Il assure ainsi que "la société dispose d'une bonne défense contre les allégations" à son encontre.
K.Grimaud--PS