
STMicroelectronics: le conseil de surveillance soutient le PDG renié par Rome

La joute se poursuit au sein du groupe de puces électroniques STMicroelectronics, où le conseil de surveillance a officiellement renouvelé jeudi son soutien au PDG, désavoué la veille par l'Italie, co-actionnaire avec la France d'une partie de l'entreprise.
"Le conseil de surveillance exprime son soutien renouvelé à Jean-Marc Chéry (...) et à l'équipe de direction, notamment dans leur capacité à exécuter la transformation dans une période difficile pour l'industrie des semiconducteurs", a indiqué l'instance dans un communiqué publié dans la matinée.
Une réaction directe aux propos du ministre italien des Finances, Giancarlo Giorgetti. Par sa voix, Rome, qui détient avec la France 27,5% des parts du groupe, a retiré mercredi son soutien au président du directoire et directeur général.
Le ministre italien des Entreprise Adolfo Urso a indiqué jeudi partager la position de M. Giorgetti.
Cette montée des tensions survient sur fond de renouvellement de deux postes au sein du conseil de surveillance, chargé du contrôle de la gouvernance du groupe.
Le conseil a accepté mardi la candidature de Simonetta Acri mais a rejeté celle de Marcello Sala, directeur général du département économique du ministère des Finances italien.
La décision, qualifiée d'"incompréhensible, très grave et inacceptable" par le ministre italien, n'a pas fait bouger Rome de sa ligne.
"Le ministère des Finances évalue ses options" à la suite du rejet de cette candidature, a précisé M. Giorgetti mercredi. L'Italie compte proposer à nouveau M. Sala, proche de la Première ministre Giorgia Meloni.
Si Adolfo Urso a affirmé que Rome continuerait à travailler "en pleine communion d'intentions" avec ses homologues et que Bercy a assuré mercredi à l'AFP que le dialogue était maintenu entre les deux pays, les co-actionnaires semblent divisés sur plusieurs points essentiels relatifs à la gouvernance.
Nicolas Dufourcq, directeur général de la banque publique d'investissment Bpifrance et président du conseil de surveillance de STMicroelectronics, a tenté de faire entendre la position française mercredi.
Dans une déclaration écrite transmise à plusieurs médias dont l'AFP, il a souligné que le rejet de la candidature de M. Sala n'était en rien le fait des représentants de la France.
Selon lui, le refus émane d'administrateurs indépendants, qui partagent les huit postes du conseil de surveillance avec les représentants français et italiens.
- Class action -
Le front ouvert entre Rome et Paris se refermera-t-il avec cette déclaration de confiance exprimée par le conseil de surveillance ?
Outre ces tensions internes, le groupe doit faire face à d'importants défis financiers, et l'Italie s'inquiète d'un manque d'investissements sur son territoire.
"C'est le moment de s'attaquer aux questions liées au développement industriel et donc aux investissements en Italie, en décidant comment procéder dans les prochains mois pour inverser ce que nous pouvons définir comme un plan incliné à notre désavantage", a martelé M. Urso jeudi.
Le groupe est aussi visé par une plainte déposée aux Etats-Unis à l'été 2024 en vue d'une "class action", ou action de groupe.
Un actionnaire a reproché à Jean-Marc Chéry et au directeur financier du groupe, Lorenzo Grandi, d'avoir fourni des informations et "des déclarations extrêmement positives" aux investisseurs avant la publication de mauvais résultats qui ont provoqué la baisse du cours de bourse.
Le conseil de surveillance a qualifié de "fausses" les accusations portées contre les membres de la direction d'avoir vendu leurs actions avant publication des résultats.
"Les ventes d'actions effectuées pendant la période d'interdiction de la société ont été réalisées par l'administrateur du plan d'actions de la société, par le biais d'une procédure automatique, afin de se conformer aux règles fiscales suisses", a indiqué l'organe.
Il assure ainsi que "la société dispose d'une bonne défense contre les allégations" portées à son encontre.
En parallèle, le groupe a amorcé fin 2024 l'élaboration d'un plan d'économies et envisage de réduire ses charges d'exploitation pour un montant compris entre 300 et 600 millions de dollars (entre 288 et 345 millions d'euros).
Fin janvier, STMicroelectronics avait annoncé une chute de 63% de son bénéfice annuel, tombé à 1,56 milliard de dollars (1,5 milliard d'euros), après plusieurs trimestres de recul accéléré de sa rentabilité.
F.Richard--PS