
Les Gabonais élisent leur président après 19 mois de régime militaire

Les Gabonais votent samedi pour élire leur président, après 19 mois de régime de transition porté par Brice Clotaire Oligui Nguema, ancien chef de la garde républicaine et meneur du putsch d'août 2023 contre la dynastie Bongo, qui a quitté son uniforme pour briguer un mandat de sept ans.
Omniprésent sur les panneaux d'affichage, dans les médias et sur les réseaux sociaux, le "président candidat" a largement dominé la brève campagne électorale face à sept concurrents quasiment invisibles, dont le dernier Premier ministre d'Ali Bongo (2009-2023), Alain-Claude Bilie By Nze.
Le nouvel homme fort du Gabon s'est prédit une "victoire historique", qui doit marquer le retour à l'ordre constitutionnel dans ce pays riche en pétrole mais économiquement exsangue après des décennies de gabegie, de pillage et de gaspillage sous le régime de la famille Bongo.
Chômage, pannes d'électricité, coupures d'eau, routes dégradées, transports publics insuffisants, manque d'écoles, hôpitaux défaillants... les défis sont nombreux et les attentes des 2,3 millions d'habitants très élevées.
Quelque 920.000 électeurs sont attendus entre 07H00 (06H00 GMT) et 18H00 (17H00 GMT) dans 3.037 bureaux de vote pour ce scrutin à l'origine annoncé pour le mois d'août et finalement anticipé. Le régime de transition ayant opté pour un calendrier resserré, la campagne électorale n'a duré que 13 jours.
Une cinquantaine de missions d'observation regroupant environ 2.450 personnes ont été accréditées par les autorités, qui ont promis un scrutin "libre et transparent". Les résultats pourraient être publiés dès lundi, selon des sources au ministère de l'Intérieur.
"Le bâtisseur est là, le candidat spécial, celui que vous avez appelé", a dit M. Oligui jeudi lors de son meeting de clôture à Libreville, avec musique, danse, fontaine lumineuse et lâcher de ballons. Comme les jours précédents à Franceville (est) ou Mouila (sud), les images de ses pas de breakdance sont devenues virales sur les réseaux sociaux.
- Foules enthousiastes -
Sa nouvelle plateforme, le "Rassemblement des bâtisseurs", a reçu le soutien d'innombrables mouvements et associations qui l'ont accompagné dans une tournée triomphale à travers le pays, réunissant des foules enthousiastes, distribuant des casquettes, tee-shirts et pagnes à son effigie.
"Le 12 c'est le 12" et "Une victoire cash" sont les slogans les plus populaires de ses partisans.
Loin des grands shows de celui qui promet "l'essor vers la félicité", les autres candidats ont mené des campagnes de terrain très discrètes, avec porte-à-porte et causeries.
Alain-Claude Bilie By Nze, qui se présente comme son principal adversaire, s'est érigé en candidat de "la rupture totale", accusant M. Oligui, au vu de ses fonctions passées auprès des Bongo, d'incarner la continuité du système.
Plusieurs associations, comme la Fédération des acteurs du gospel du Gabon et l'Union des jeunes pour des actions communautaires (UJAC), ont appelé les électeurs à se mobiliser. Une improbable "association des neutres" a même organisé vendredi une conférence de presse pour "prendre position contre l'abstention" et soutenir "le grand candidat" Brice Oligui Nguema.
En novembre dernier, de nombreux électeurs ne s'étaient pas déplacés pour le référendum sur la nouvelle constitution, finalement adoptée avec 91,64% de "oui" et un taux de participation de 54,18%, selon les chiffres officiels.
La journée de vendredi a été déclarée fériée et les transports publics seront gratuits samedi, selon les communiqués officiels.
Les débits de boisson seront fermés de vendredi 23H30 à samedi 00H00, selon un communiqué lu à la télévision publique par un présentateur en civil et non par des militaires en uniformes, comme cela était généralement le cas depuis le coup d'Etat.
La nouvelle loi électorale prévoit un affichage des procès-verbaux dans chaque bureau de vote et dans chaque commission de centralisation des résultats. Disposition héritée de l'ancien code électoral, les bulletins de vote seront incinérés dans chacun des bureaux de vote après dépouillement.
N.David--PS