
La guerre des droits de douane s'enflamme et fait paniquer les marchés mondiaux

La Chine et l'Union européenne ont annoncé mercredi une riposte après l'entrée en vigueur d'une nouvelle salve de droits de douane américains, alimentant la volatilité sur les marchés alors que les relations sino-américaines connaissent leur pire moment depuis des décennies.
Face à cette offensive, le ministre des Finances américain, Scott Bessent, a mis en garde les pays tentés de se rapprocher de la Chine pour tenter de contrebalancer les effets des droits de douane américains, estimant qu'une telle stratégie "serait suicidaire".
Les surtaxes annoncées par Washington sont "un plafond", a-t-il assuré, "si vous ne répliquez pas".
Au total, 60 pays sont concernés par les surtaxes supplémentaires décidées par le président Donald Trump, entrées en vigueur à 04H00 GMT.
Parmi eux, c'est la Chine, rival et adversaire, qui écope de la surtaxe la plus sévère. En ajoutant celles déjà entrées en vigueur depuis janvier, le total des surtaxes atteint désormais 104% pour les produits "made in China", ce qui revient à en doubler les prix. Un niveau record qui a poussé Pékin à répliquer du tac-au-tac.
Dans un communiqué, le ministère chinois du Commerce a annoncé des droits de douanes supplémentaires de 84% sur les produits américains à partir de ce jeudi à 12H01 heure chinoise (04H01 GMT), en lieu et place des 34% annoncés vendredi dernier.
"Nous continuerons à prendre des mesures fermes et vigoureuses pour sauvegarder nos droits et intérêts légitimes", avait prévenu un peu plus tôt un porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
- "Accords sur mesure" -
Visée depuis mi-mars par des droits de douane américains de 25% sur l'acier et l'aluminium, l'Union européenne a adopté mercredi ses premières mesures de riposte, portant sur une première liste de plus 20 milliards d'euros de marchandises "made in USA".
Cette liste, peaufinée depuis des semaines, comporte des produits agricoles comme le soja, la volaille, le riz, et plusieurs fruits. Elle prévoit également des droits allant jusqu'à 25% sur le bois, les motos, des produits plastiques et des équipements électriques.
La riposte aux droits de douane de 20% sur l'ensemble des produits européens, entrée en vigueur mercredi dans le cadre de la nouvelle salve de droits de douane américains, pourrait quant à elle être présentée en début de semaine prochain, selon la Commission européenne.
Bruxelles s'est toutefois dite prête à suspendre ses droits de douane "à tout moment" en cas d'accord "juste et équilibré" avec Washington.
Lors d'un dîner mardi soir avec des élus républicains, le président Donald Trump a assuré que des dizaines d'Etats -- y compris la Chine d'après lui -- souhaitaient tout faire pour trouver "des accords sur mesure" avec son administration.
"Ces pays nous appellent pour nous lécher le cul (...) Ils meurent d'envie de signer un accord: +pitié, pitié, monsieur, signons un accord, je ferai n'importe quoi" pour cela", a-t-il plastronné, en imitant ses supposés interlocuteurs.
- "Fragmentation du commerce mondial" -
L'escalade de la guerre commerciale, qui fait craindre une envolée de l'inflation et une chute de la consommation et de la croissance mondiale, fait souffler un nouveau vent de panique mercredi sur les marchés boursiers asiatiques et européens, après un petit répit la veille.
En Europe, les principaux indices à Paris, Francfort ou Londres perdaient près de 4% en début d'après-midi. Plus tôt, l'indice japonais Nikkei avait terminé sur un plongeon de 3,93%. D'autres places en Asie ont également chuté, comme Taipei (-5,8%) ou Séoul (-1,73%).
Contre toute attente, Wall Street était dans le vert peu après son ouverture. Mais les obligations d'Etat et le dollar sont massivement délaissés par les investisseurs.
"RESTEZ COOL. Tout va bien se passer", a promis Donald Trump mercredi sur son réseau Truth Social. "C'EST LE MOMENT D'ACHETER", a aussi écrit le président américain, faisant sans doute référence à la forte baisse des cours de Bourse de ces derniers jours.
La crainte d'un cycle sans fin de représailles a poussé mercredi certaines banques centrales à réagir. Celle de Nouvelle-Zélande a réduit ses taux d'intérêt de 25 points de base à 3,5%. La Banque centrale indienne a elle abaissé ses taux d'intérêt à 6%.
Les "risques liés à la fragmentation du commerce mondial de biens et sur les marchés financiers se sont intensifiés" et pourraient "nuire à la stabilité financière", a prévenu de son côté la Banque d'Angleterre.
Les craintes sur le commerce mondial ont poussé l'Italie à diviser par deux mercredi sa prévision de croissance pour 2025, à 0,6%. En France, elle devrait plafonner à 0,5%, selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), qui tablait jusqu'à présent sur 0,8%.
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B.Mercier--PS