
Après une parenthèse de dix mois, la fin de vie fait son retour à l'Assemblée

Dix mois après avoir vu son examen interrompu par la dissolution, le texte sur la fin de vie fait son retour mercredi à l'Assemblée nationale, scindé en deux propositions de loi, portant l'une sur les soins palliatifs, et l'autre sur "l'aide à mourir".
Les députés entameront à 9H30 en commission des Affaires sociales l'examen des deux textes, portés respectivement par Annie Vidal (Renaissance) et Olivier Falorni (MoDem), en commençant par l'audition des ministres compétents, Catherine Vautrin et Yannick Neuder.
Le Premier ministre François Bayrou a souhaité cette scission, afin de permettre à tous de "pouvoir voter sur chacun de ces deux textes différemment".
Si la proposition de loi sur les soins palliatifs, globalement consensuelle, devrait être adoptée sans difficulté, la seconde, qui légalise le suicide assisté - et, dans certains cas, l'euthanasie - avec de strictes conditions et sans employer ces termes, devrait donner lieu à d'intenses controverses.
"Notre responsabilité est grande. Répondre aux souffrances sans brusquer les consciences", avait souligné en mai la ministre de la Santé Catherine Vautrin, défendant la nécessité de conserver dans le texte le bon "équilibre" sur un sujet complexe, qui touche à l'intime et transcende les clivages politiques.
- Cinq critères -
Les deux propositions de loi sont un quasi copié-collé du projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie, défendu au printemps par Mme Vautrin, dans l'état où il se trouvait au moment de la dissolution.
Au terme de deux semaines de discussions dans l'hémicycle, les députés étaient allés jusqu'à son article sept.
Ils avaient notamment voté son article clé, et décidé de créer un droit à une aide à mourir conditionné à cinq critères: être âgé d'au moins 18 ans ; français ou résidant en France ; être atteint d'une "affection grave et incurable, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale" ; cette dernière provoquant une "souffrance physique ou psychologique" réfractaire aux traitements ou insupportable ; être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.
Une définition différente de ce que proposait le texte initial du gouvernement, qui prévoyait que ce pronostic vital soit engagé "à court ou moyen terme" - la difficulté étant de savoir ce que recouvre cette notion de "moyen terme". Un avis de la Haute Autorité de Santé sur le sujet est attendu, qui devrait être publié début mai, selon une source parlementaire, avant le début de l'examen dans l'hémicycle, prévu le 12 mai.
Autres points qui devraient susciter de vifs débats : la question des directives anticipées, certains considérant comme Mme Vautrin que le patient doit jusqu'au moment du geste létal être capable d'exprimer son consentement ; ou encore la collégialité ou pas de la décision - le texte prévoit pour l'instant que la décision soit prise par un seul médecin, ce que conteste Yannick Neuder.
- Deux votes solennels -
Pour le député LR Thibault Bazin, en pointe sur le sujet, le texte de M. Falorni "ne correspond plus à l'équilibre affiché" par le gouvernement dans son projet de loi initial, et son adoption est incertaine, alors que chaque groupe laissera la liberté de vote à ses membres.
M. Falorni estime au contraire que les députés sont parvenus à un "équilibre satisfaisant", et espère que son texte va recueillir une "majorité de suffrages".
Engagé de longue date pour une fin de vie "libre et choisie", il met en garde les parlementaires qui se livreraient au "petit jeu de l'obstruction" pour empêcher son texte d'aboutir, comme ce fut le cas en 2021, lors de l'examen d'une proposition de loi sur le sujet dont il était déjà le premier signataire.
"Ils seraient très mal jugés par l'opinion publique", estime-t-il, alors que la légalisation d'une forme d'aide à mourir, promesse de campagne d'Emmanuel Macron en 2017, bénéficie d'un large soutien des Français.
Deux votes solennels sont prévus de manière simultanée le 27 mai, une manière selon M. Falorni de contrer d'éventuelles tentatives d'obstruction. Dans son combat, il sait pouvoir compter sur la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet, qui n'a eu de cesse de soutenir l'inscription d'un texte à l'ordre du jour des travaux des députés.
C.Blanc--PS