
La compagnie italienne Trenitalia veut concurrencer Eurostar sur le Paris-Londres

Plus de trente ans après l'ouverture du tunnel sous la Manche, un concurrent d'Eurostar va-t-il enfin pouvoir lancer ses trains entre Londres et Paris ? Ferrovie dello Stato et sa compagnie Trenitalia en ont l'intention, mais d'autres avant eux ont esquissé ce projet sans succès.
Le groupe ferroviaire italien a annoncé mardi son intention d'investir un milliard d'euros pour une ouverture de ligne d'ici 2029.
"Cet investissement représente un pas en avant décisif dans la vision du Groupe FS de construire un réseau ferroviaire européen plus intégré, compétitif et durable", a souligné le directeur général de FS Stefano Antonio Donnarumma.
Si le projet aboutit, les liaisons seront effectuées avec "des rames inspirées du Frecciarossa", le train à grande vitesse qui circule sur le réseau à grande vitesse italien et en France entre Paris, Lyon et Milan, a indiqué FS.
Cette annonce intervient un peu plus d'une semaine après celle de l'Office of Rail and Road (ORR), le régulateur ferroviaire britannique, sur la possibilité d'ouvrir le centre de maintenance des trains Eurostar en Angleterre à des opérateurs concurrents.
Le dépôt de Temple Mills "serait en mesure d'accueillir des trains supplémentaires si nécessaire", a écrit l'ORR le 31 mars.
- Infrastructure sous-exploitée -
Cette décision a ouvert la voie au développement de la concurrence. L'accès à un centre de maintenance pour l'entretien des trains est un facteur décisif pour l'exploitation d'une ligne commerciale régulière.
Plusieurs compagnies ont déjà partagé leur envie d'ouvrir une liaison entre Paris et Londres pour concurrencer Eurostar, dont les prix sont souvent jugés prohibitifs.
La néerlandaise Heuro s'est dite intéressée, tout comme l'opérateur espagnol Evolyn. FS a d'ailleurs précisé dans son communiqué avoir signé un protocole d'accord avec Evolyn, sans en dévoiler les contours.
Début mars, le groupe britannique Virgin, qui a exploité des trains en Grande-Bretagne entre 1997 et 2019, avait annoncé son intention de lever 700 millions de livres pour ouvrir, là aussi en 2029, une ligne de transport de passagers concurrente à Eurostar.
La société Eurotunnel essaie depuis longtemps d'attirer de nouveaux opérateurs dans le tunnel sous la Manche.
D'après le directeur général de Getlink - propriétaire d'Eurotunnel - Yann Leriche, l'infrastructure pourrait accueillir environ 1.000 trains par jour, contre 400 aujourd'hui.
Grâce à la standardisation des normes du tunnel, un opérateur peut espérer se lancer cinq ans après la décision d'ouvrir une liaison, contre dix ans auparavant, selon M. Leriche.
- L'essai Deutsche Bahn -
Côté britannique, l'entreprise London St. Pancras Highspeed, gestionnaire de la ligne à grande vitesse entre Londres et le continent européen, a annoncé vendredi dernier mettre en place des incitations financières pour attirer de nouvelles compagnies et doper le trafic face au monopole d'Eurostar.
"Une concurrence accrue permettra davantage de choix pour les voyageurs, des tarifs plus bas et de nouvelles destinations possibles", s'est réjoui auprès de l'AFP son directeur général Robert Sinclair. Selon lui, sa ligne à grande vitesse n'est exploitée qu'à 50% de ses capacités.
En 2024, 19,5 millions de clients ont voyagé avec Eurostar, un record pour la compagnie détenue par la SNCF, qui espère transporter 30 millions de passagers et acquérir 50 nouveaux trains d'ici 2030.
L'arrivée d'opérateurs concurrents est très attendue des usagers pour faire baisser les prix. Eurostar pratique des tarifs deux fois plus élevés que la moyenne européenne, selon une estimation de l'ONG Transport and Environment(T&E).
Les projets de nouvelles liaisons entre Londres et le continent n'ont rien de nouveau. En 2013 déjà, la Deutsche Bahn avait fait rouler un de ses ICE dans le tunnel sous la Manche.
A l'époque, l'opérateur historique des chemins de fer allemand envisageait de proposer ses premiers voyages en 2016. Le projet n'a jamais abouti.
G.Perrin--PS