
Chimie: la reprise de Vencorex attribuée au chinois Wanhua

Pas de miracle pour Vencorex: la reprise de l'usine chimique, située près de Grenoble, a été attribuée jeudi à son concurrent chinois Wanhua, qui ne reprendra qu'une fraction des salariés.
Le tribunal de commerce de Lyon a jugé "irrecevable" un projet de reprise en coopérative par deux de ses salariés, qui aurait permis de sauvegarder davantage de poste et de garder ce "fleuron" de la chimie dans le giron français.
Des "regrets" face à une "terrible nouvelle", des élus de tous bords ont immédiatement critiqué une décision symbolisant, selon eux, la "perte de souveraineté de la France".
Après avoir auditionné les deux parties le 3 avril, le tribunal a tranché en faveur du projet chinois, présenté à l'automne via sa filiale hongroise BorsodChem, qui prévoit le maintien d'une cinquantaine d'emplois sur les 450 que comptait le groupe initialement.
Le prix de cession est de 1,2 million d'euros, et BorsodChem s'engage à investir 19 millions d'euros sur le site d'ici 2027.
Salariés et élus n'ont pourtant eu de cesse ces derniers mois d'appeler à l'aide le gouvernement pour empêcher ce "scénario catastrophe". Selon eux, les déboires de Vencorex mettent en péril des milliers d'emplois dans la région en raison de l'interconnexion des activités.
Ils ont également mis en garde contre le risque de perte de souveraineté pour des secteurs comme le nucléaire ou le spatial - dont certains groupes utilisent les sels produits par Vencorex, et sur les conséquences pour l'environnement.
Une demande de nationalisation temporaire du groupe a été rejetée au début de l'année par le Premier ministre François Bayrou, face aux doutes sur le modèle économique du site de Pont-de-Claix.
- Trésorerie -
"Ce jugement vient conforter un projet industriel ambitieux structuré depuis plus de six mois, et marque le point de départ d’un nouvel avenir pour ce site stratégique de la chimie française", s'est réjoui Wanhua dans un communiqué.
"Nous avons désormais un objectif clair : redonner toute la dynamique au site de Pont-de-Claix, dans une logique d’excellence industrielle et d’ancrage territorial. Le travail commence maintenant", a déclaré Dr Howard Ding, Président de Wanhua Performance Chemicals.
Le projet concurrent, baptisé CIRCEI (Coopérative industrielle de relance Chimie Electrochimie Isocyanate) et bâti en quelques semaines par deux salariés de la CGT aidés par un entrepreneur local, a bénéficié d'une forte mobilisation locale et de promesses d'engagement financier mais le tribunal ne l'a pas jugé assez abouti.
Les porteurs avaient requis auprès de la justice un nouveau délai de quatre semaines pour boucler leur dossier. Or, "la trésorerie ne permet pas de garantir la mise en sécurité du site au-delà de 15 jours", relève le tribunal pour qui il existe "un doute sur la finalisation possible du projet de reprise".
- "Vencorex bradé" -
La Région Auvergne-Rhône-Alpes, qui s'était déclarée prête, à l'instar d'autres collectivités, à participer financièrement au projet de SCIC, a pris "acte de cette décision, avec le regret de voir ce fleuron industriel passer sous pavillon étranger".
"Si nous nous félicitons de la préservation d'une cinquantaine d'emplois, nous aurions souhaité un engagement bien supérieur de la part du repreneur", ajoute-t-elle dans un communiqué.
"C'est la mise au chômage de centaines de familles et la perte de notre souveraineté", a aussi écrit la député écologiste Cyrielle Chatelain sur le réseau Bluesky.
La France Insoumise a pour sa part accusé le gouvernement de ne pas avoir fait assez pour sauver Vencorex. "Vencorex bradé à Wanhua, son concurrent. C'est le savoir-faire français liquidé", a réagi sur X son leader Jean-Luc Mélenchon, qui s'était rendu sur le site en soutien aux salariés. "Terrible symbole du démantèlement de notre industrie et du renoncement de Macron !"
"Quelle terrible nouvelle, à mille lieux des annonces sur la souveraineté industrielle de la France", a renchéri son lieutenant, le député LFI Manuel Bompard, toujours sur X.
L.Lefevre--PS